« La récréation est très souvent perçue comme une période de détente, de plaisir, de défoulement... », entame Gilles Moindrot, secrétaire général et porte-parole du SNUIPP [2]. "Mais il s’agit en fait d’un moment d’éducation de grande importance, régi, le plus souvent, selon différents modes d’organisation instaurés par les élèves eux-mêmes.
Dans la cour, développement de l’autonomie rime avec prise de risque, et apprentissage de la vie en groupe résonne avec luttes de pouvoir... L’encadrement doit donc veiller aussi bien à la sécurité des lieux qu’à la régulation des conflits entre les élèves", poursuit le syndicaliste. Or, si concernant la conformité des installations, les textes sont clairs, attribuant aux collectivités territoriales la responsabilité des espaces et matériels [3], les lignes traitant de la qualité du service de surveillance de la récréation sont moins précises...
Elles laissent aux directeurs d’école le soin d’organiser cette surveillance de manière efficace, sans pour autant fixer de normes, en fonction « de l’importance des effectifs et de la configuration des lieux » [4] et aux CPE de « conjuguer l’impératif de surveillance des élèves et la nécessité d’apprentissage progressif de la responsabilité et de l’autonomie ». Bref, en la matière, place semble faite au bon sens.
À l’école
« Le service de surveillance des enseignants commence dix minutes avant le début de la classe et se termine, exception faite de la pause méridienne [5], dix minutes après la fin des cours, au moment de la remise des enfants à leur famille ou aux personnes ayant la charge de l’accueil périscolaire », explique Jean-Claude Rolland.
Conseiller pédagogique de circonscription pour le 1er degré et responsable du réseau d’échanges de pratiques pédagogiques des écoles d’Epinay-sur-seine (EPPEE) [6], le professeur des écoles maître formateur ajoute : "de fait, la surveillance des temps de récréation est placée sous l’entière responsabilité des enseignants présents dans la cour conformément au tableau de service établi par le directeur en conseil des maîtres.
Bien sûr en cas d’absence d’un professeur ou d’une urgence quelconque, un atsem (agent territorial spécialisé des écoles maternelles, ndlr) peut être amené à surveiller momentanément la cour de récréation, voire à encadrer un groupe d’élèves lorsque la récréation a été pensée au préalable [7] mais sans jamais en porter la responsabilité« . Et Gilles Moindrot de se faire rassurant : »Dans le 1er degré, les enseignants ont une vraie culture de la sécurité. Le plus délicat pour eux est de concilier un certain laisser-faire et une vigilance de tous les instants".
Au collège et au lycée
Cet équilibre difficile à trouver en primaire entre surveillance accrue, respect de l’individu et apprentissage de l’autonomie l’est encore davantage dans le secondaire.
Les textes [8] témoignent de cette difficulté en traitant séparément le cas des collèges de celui des lycées. Ainsi les principaux sont invités à « porter une attention particulière au moment où les élèves ne sont pas en classe, pendant les récréations et les interclasses » et les proviseurs à déterminer des « modalités de mise en œuvre de l’autodiscipline durant les temps libres inscrits à l’emploi du temps ».
Dans l’ensemble des EPLE, les assistants d’éducation qui peuvent parfois être secondés par des personnels employés dans le cadre de contrats d’aide à l’emploi (CAE), sont chargés de la surveillance de la cour de récréation selon les dispositions prises par les conseillers pédagogiques d’éducation. « Ce qui en aucun cas ne saurait dédouaner les enseignants et les divers autres membres de la communauté éducative de leur obligation de surveillance des élèves », conclut un inspecteur d’académie du sud-ouest de la France.
Marie-Laure Maisonneuve, VousNousIls
Défaut de surveillance : à qui la faute ?
Une insuffisance de surveillance, qu’elle soit du fait d’un membre [9] de l’enseignement, par manque de vigilance, ou consécutive à une insuffisance de l’organisation du service, peut donner lieu à une demande d’action en réparation de la part de la victime (ou de ses représentants légaux).
Dans le premier cas, et conformément à la loi du 5 avril 1937 [10], la responsabilité de l’Etat se substitue à celle du personnel devant les juridictions civiles. Dans la seconde hypothèse, la responsabilité peut revenir pleinement à l’Etat, à l’établissement (par l’intermédiaire de son conseil d’administration) ou encore être partagée avec la collectivité territoriale.
Commentaire : il peut y avoir quelques différences dans les appellations
– EPLE : établissement public local d’enseignement, remplacé par établissement privé sous contrat d’association ;
– assistants d’éducation ou conseiller principal d’éducation : les appellations sont très diverses dans le privé ;
ou des différences de fonctionnement
– sur les conseils d’administration : qui n’incluent malheureusement que trop rarement des représentants élus du personnel dans le privé.
Il reste que les mêmes textes s’imposent à nous, donc les mêmes responsabilités.