Retraites, un recul social et un autre…

mercredi 4 novembre 2015


Après des mois de pression du MEDEF, et avec le concours du gouvernement et de trois syndicats (CFDT, CFTC, CGC), les négociations sur l’Arrco et l’Agirc se soldent par un accord intolérable pour des millions de travailleurs. Cet accord prévoit un allongement d’un an de la durée de cotisation. Une double peine se cache derrière cela en instaurant un principe dissuasif de décote.

  •Ce qui va changer en 2016 :

Poursuite de la sous-indexation des retraites pendant trois ans. À l’instar de ce qu’il se passe depuis 2013, les pensions seront revalorisées selon l’inflation moins 1 point. Une clause plancher prévoit que les retraites ne soient pas diminuées en cas de hausse des prix inférieure à 1 point. Ce qui équivaut à un gel des pensions en période de faible inflation.
 Décalage de la revalorisation des retraites du 1er avril au 1er novembre.
 Augmentation du prix d’achat du point Arrco et Agirc. Pour les actifs, pendant trois ans (de 2016 à 2019).
 Ouverture de négociations sur la définition de la fonction de cadre, en vue de la fusion des deux régimes.
 Une nouvelle cotisation patronale appliquée sur le salaire des cadres rapportera 120 millions d’euros par an.

  • Mesures applicables à partir de 2019

 Mise en place, à partir de la génération née en 1957, d’un « coefficient de solidarité » de 10% pendant trois ans pour les salariés partant à la retraite. Les personnes exonérées de CSG en seront exemptés (soit 30% des retraités).
Concrètement, une personne qui, à 62 ans, remplit toutes les conditions de durée de cotisation pour prendre sa retraite pourra le faire, mais elle subira un « malus » 10% du montant de sa pension complémentaire pendant trois ans, jusqu’à 65 ans. Le mécanisme joue aussi dans le cas d’un départ à taux plein à 63 ou 64 ans (avec un abattement jusqu’à 66 ans ou 67 ans). Le malus ne pourra pas être appliqué au-delà de 67 ans. Selon la CFDT, il en coûterait 40 à 50€ aux futurs retraités, soit 3% de la pension complète.
En revanche, le mécanisme est annulé dès lors que le salarié prolonge son activité pendant un an, après l’âge de son taux plein. Au-delà, des bonus sont prévus : +10% pendant un an pour un départ reporté de 8 trimestres, + 20% et + 30%, également pendant un an, en travaillant 12 ou 16 trimestres supplémentaires.
 Augmentation du taux d’appel des cotisations, ce qui rapportera 800 millions d’euros (dont 60% à la charge des employeurs).
 Création d’un régime unifié et mutualisation des réserves de l’Arrco (61,8 milliards d’€) et de l’Agirc (14,1 milliards d’euros).
 Baisse des dépenses de gestion pour environ 300 millions d’euros et baisse des dépenses d’action sociale.

  •Un partage de l’effort très inégal

Le texte instaure, à partir de 2019 et de la génération 1957, un « bonus-malus » pour les futurs retraités. Un mécanisme destiné à les inciter à travailler plus longtemps, au-delà de l’âge et de la durée légale de cotisation. Les retraités sont également mis à contribution avec la prolongation jusqu’en 2019 de la sous-indexation des pensions d’un point de moins que l’inflation. L’accord doit être officiellement validé le 30 octobre 2015.

  •Les femmes, les éternelles oubliées

Toute augmentation de la durée de cotisation pénalise davantage les femmes car elles ont encore aujourd’hui des carrières en moyenne plus courtes (temps partiel, congé parental…). En 2014, les femmes liquident leur retraite huit mois plus tard que les hommes à l’Arrco et la pension moyenne de l’Agirc pour les femmes ne représente que 40,2% de celle des hommes. Cet accord a un écho particulier dans l’enseignement privé puisque les femmes représentent 73,7% des effectifs. De nombreuses organisations interpellent les organisations syndicales qui se sont prononcées en faveur de la réforme afin qu’elles ne signent pas cet accord.1
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  •Un allongement de l’âge légal de départ à la retraite

A travers cet accord, le Medef (avec les encouragements du gouvernement et la complicité des trois syndicats signataires) a trouvé un moyen de repousser l’âge de la retraite d’un an sans qu’une loi soit votée.
Face à une nouvelle agression du MEDEF, il faut donner plus de poids aux organisations syndicales qui comme le SUNDEP-Solidaires luttent aux côtés des salariés pour le progrès social.


[1(Appel publié dans Mediapart, le 28 octobre 2015, par Osez le féminisme, Le Planning familial, la Fondation Copernic, ATTAC France et les Féministes en mouvement.)